Le livre Homo sapienne de Niviaq Korneliussen

Le roman Homo sapienne, premier effort de Niviaq Korneliussen, est un tour de force. Chez elle comme à l’international, l’autrice a donné une visibilité à une communauté encore marginalisée dans la littérature populaire en plus d’exposer ces lecteurs étrangers à un territoire peu connu, le Groenland.

Magnifiquement écrit, relatant un moment dans la vie de cinq personnages issus de la communauté LGBTQ groenlandaise, ce récit a touché un nombre inattendu de personnes. Tout d’abord, en plus de sa mise en scène de personnages homosexuels et transgenres, c’est certainement grâce à son écriture sans détour que ce roman a su se démarquer. Sa singularité vient aussi du fait qu’il met de côté l’image du Nord dominée par la nature et les grands espaces pour plutôt camper l’action en milieu urbain.

Ce qui est frappant, c’est que chaque personnage a sa voix et sa façon d’enfiler les mots. Dès qu’on fait la connaissance d’un nouveau narrateur, on sent tout de suite la différence de ton et la personnalité à travers le rythme. C’est dans ce contexte que l’on rencontre les cinq protagonistes, Fia, Ivik, Inuk, Arnaq et Sara, tous à un moment charnière de leur vie où ils se révèlent à eux-mêmes et aux autres.

Dans ce processus d’acceptation de soi, ils affrontent leurs insécurités par rapport à leur identité sexuelle et de genre, mais aussi leur sentiment d’appartenance envers leur pays et leur quête du bonheur et de l’amour. Chacun d’entre eux emprunte un chemin différent pour atteindre une certaine sérénité et celle-ci passe fréquemment par le support des amis et de la famille.

J’ai lu des livres avec des personnages LGBTQ, mais je dois dire que ce livre arrive à nommer des choses et à parler de certains sujets propres à cette communauté directement et sans sous-entendu. Korneliussen n’a pas peur de briser les conventions et nous offre des voix trop souvent mises sous silence.

C’est en nous donnant la possibilité de suivre les pensées respectives des personnages qu’elle nous aide à mieux comprendre les enjeux liés à leur tiraillement en plus de traiter de thématiques qui touchent une majorité de jeunes adultes de toutes les générations et de toutes les orientations.

On réalise ainsi qu’on est tous passés par une période de questionnements dans nos vies où nous n’étions pas certain de qui nous étions. Habituellement, dans ces situations, nous en apprenons davantage sur nous-mêmes et en sortons grandis.

C’est également ce que j’ai ressenti par rapport aux personnages en terminant ce récit. Ils se sont épanouis, ils se connaissent davantage et réussissent petit à petit à bâtir leur confiance pour affronter le monde extérieur et à vivre pleinement.

À lire si vous êtes intéressés par la représentation de la communauté LGBTQ, mais aussi si vous êtes interpellés par un texte qui mélange astucieusement des enjeux sociaux, culturels, politiques et sexuels.

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